TYPE : Animations video par LED sous plaques de verre
DIMENSIONS : 6 plaques de verre
LIEU : Université Paul Sabatier
Le flux s’inscrit dans tous les domaines de la nature et de l’action humaine, de la science à l’esthétique, jusqu’à l’architecture, elle même organisant les flux humains. Le flux, symbole de vie et de mouvement, « d’échange et de coupure » selon la formule de Gilles Deleuze, s’impose dans toutes les strates de notre appréhension du réel. La Technique contemporaine organise les flux et leur coupure. Flux de l’argent, flux tendu des marchandises, flux de la pensée mondialisée qui s’échange en temps réel. Emblématique et révélateur de ces flux physiques et immatériels de la marchandise et des idées, le web est aujourd’hui une machine-réseau révolutionnaire qui capte, organise, coupe, régule et produit ce flux mondialisé.
Dans la bibliothèque réelle, comme la bibliothèque scientifique de Paul Sabatier, le flux vital apparaît concrètement à travers les mouvements et déplacements même de la pensée en acte dans un fourmillement de personnes et d’idées.
L’œuvre que je propose vise donc à révéler et exemplifier dans ce cadre intellectuel notre relation au flux vital du mouvement et au flux immatériel de la pensée. Cette installation FLUX propose une expérience concrète, physique et corporelle, de notre relation au phénomène du flux et de sa symbolique vitale articulant le corps et l’esprit, le mouvement physique et la pensée. Il s’agit bien de mettre en rapport les flux humains de ce déambulatoire aux flux lumineux de l’installation, de croiser ces flux, de les accompagner afin de créer toutes les interactions et combinaisons possibles.
Le mouvement est nécessaire pour nous diriger de l’espace dense et dynamique de l’entrée, représentant la vie de la pensée, vers l’espace statique du fond de documentation, du rayonnage et des livres, représentant la pensée potentielle pouvant s’actualiser dans la lecture.
A travers cette installation, quelque chose du lieu : le flux, s’incarne et circule, comme un écoulement de la forme, un déplacement organique et intellectuel, un devenir continu entre influx nerveux et pensée.
Mon souhait à travers cette proposition est de m’adresser directement à la sensation physique produite, proposant ainsi au penseur déambulant d’inscrire son pas et ses méditations dans ces flux continus. Je souhaiterais que ce rapport d’écoulement lumineux agisse un micro instant sur la dynamique de déplacement du public et harmonise cet instant le pas du marcheur et ce ballet collectif de déplacement.
J’ai souvenir d’une fascination pour ces flux humains construits de toutes pièces par les tapis roulants, les escalators et certains ascenseurs. A ces petits manèges, fruits de la rationalité technique de la gestion des files et des flux, j’ai emprunté cette sensation : celle du statique frotté au mouvement et inversement du mouvement au statique. Je bouge sans marcher, je marche en sens inverse, je marche dans le sens même, et ces micros sensations œuvrent sans défaillir dans l’immémoriale fascination pour le mouvement, qui ramène à la vie et à l’âme. (Etymologiquement la psyché des grecs que les latins ont traduit par anima, désignait initialement le souffle vital, par extension tout mouvement et la vie même de l’esprit.)
Plusieurs programmes répondant au nombre du public (entré sorti) organisent le sens des flux, sa densité lumineuse, son rythme de défilement. Les nuances de ces interactions sont appréhendées par des fondus enchaînés offrant ainsi une respiration lumineuse à cet ensemble. — Joël Fesel